Exclusif : premier essai du nouveau Pinarello Dogma F10

L’icône encore améliorée

C’est la surprise de ce début d’année : Pinarello présente un nouveau vélo très haut de gamme, une nouvelle version du Dogma, qui complète le déjà fabuleux F8 et qui équipera le Team Sky dès les premières courses de la saison 2017. VELOCHANNEL.COM a déjà testé en exclusivité pour vous ce Dogma F10.

De l’aveu même de Fausto Pinarello, emblématique président et digne héritier d’une entreprise qui a toujours su se placer au sommet de la hiérarchie, le Dogma F8 est à ce jour le plus grand succès commercial de la marque éponyme. Et ce, malgré un positionnement très haut de gamme en termes de tarif. Un vélo sportif et performant, certes, car on ne compte plus les victoires du Team Sky sur tous les types de terrains avec cette machine depuis juin 2014 (date de sa sortie officielle), mais aussi un vélo polyvalent qui a pu séduire par son comportement bon nombre de coureurs amateurs et cyclosportifs. Parallèlement à ces succès, et pour répondre aux exigences d’une équipe Sky qui met en avant sa recherche constante des « gains marginaux », Pinarello a aussi dû développer un vélo de contre-la-montre très performant, le Bolide TT, victorieux d’ailleurs de trois de ses quatre premières sorties officielles en 2016 avec Chris Froome. Ce qui nous amène au fameux F10, la surprise de ce début d’année, qui bénéficie des études aérodynamiques réalisées sur le Bolide TT pour améliorer encore le rendement du haut de gamme route de la marque, jusque là représenté par le Dogma F8.

Ce qui change

Au premier abord, le F10 ne révolutionne pas l’esthétisme propre aux vélos Pinarello, et c’était d’ailleurs là une volonté affirmée du côté de la direction. Ce nouveau vélo reste très proche des F8, et autres Gan, même si au niveau de la décoration, la marque fait encore une fois très fort, avec une capacité étonnante à toujours se réinventer de ce côté-là. Mais qu’on ne s’y trompe pas : le F10 utilise réellement un moule différent. Et quand on connaît le prix de ce type de moule (autour de 150 000 $), le nombre de tailles disponibles chez Pinarello (13 !), on imagine aisément que ce type d’investissement ne se fait pas au hasard. Par ailleurs, le F10 est fabriqué à partir des mêmes fibres de carbone que le F8, à savoir des fibres Torayca T1100 avec une couche de finition en 1K. Parce que, selon la marque, c’est actuellement la meilleure qualité de carbone disponible pour un cadre de vélo. L’évolution se joue donc entre le F8 et le F10 au niveau de la forme des tubes et de la disposition des couches de carbone. Et en s’inspirant des travaux réalisés sur le Bolide TT, Pinarello revendique surtout un gain aérodynamique de 12,6 % sur la partie basse du cadre et de 10 % sur la fourche.

Accessoirement, le F10 devient également plus léger de 55 g par rapport au F8 (en taille 53), et améliore son rapport poids-rigidité de 7%, grâce notamment à une asymétrie plus accentuée (mais presque invisible à l’œil nu).

Des broutilles pour l’utilisateur lambda ? Sans doute, et c’est d’ailleurs pour cela que le F8 reste bien au catalogue. D’ailleurs, la différence de prix entre les deux modèles de kits cadres ne devrait pas dépasser 5 à 6 % selon Fausto Pinarello. Sur la route, les différences sont aussi très subtiles, mais néanmoins bien réelles. Pour commencer, la géométrie des deux cadres étant strictement identique, un utilisateur habitué se sentira « comme à la maison » au guidon du F10. C’est heureux, car le comportement et la tenue de route des vélos Pinarello sont une marque de fabrique qui perdure au-delà des décennies.

Fausto Pinarello, rouleur régulier et averti, nous expliquait d’ailleurs que le moindre prototype passait d’abord entre ses mains, afin qu’il s’assure que le pilotage d’un nouveau modèle réponde aux standards de la marque. Voilà qui rassure, au moment de s’élancer sur les routes tortueuses et escarpées de Sicile, où nous enfourchons le F10, en compagnie d’une vingtaine de journalistes du monde entier, triés sur le volet. Des routes parfois un peu cahoteuses également, qui ne mettent pas en valeur la filtration des vibrations de cette bête de course (ne parlons pas de confort, car notre posture sur ce vélo est tout simplement parfaite !). Cependant, ce vélo étant équipé pour l’occasion de roues Fulcrum Speed 40 à pneu que nous ne connaissons pas, nous nous gardons de porter un jugement définitif à ce niveau-là. Dans les descentes, parfois techniques avec des courbes irrégulières, le F10 ne trahit pas sa filiation : la tenue de route est rassurante, et en même temps incisive, toujours précise.

L’avant du vélo ne flotte pas, et n’est même pas déstabilisé par un freinage appuyé au dernier moment, que permettent les étriers Shimano Dura-Ace R9100. Entre chaque virage, le F10 semble prendre facilement de la vitesse, de même qu’il fait preuve d’une certaine inertie une fois lancé sur le plat, en permettant d’entretenir facilement le rythme. Ses qualités de roulement sont indéniables, les deux roues sont parfaitement alignées au sol. Les relances sont elles aussi bien tranchantes, avec une partie avant qui semble ferme et rigide, et une boîte de pédalier qui ne bronche pas d’un souffle, même en y mettant les watts.

Quant au triangle arrière, sa rigidité peut aussi mettre à mal la souplesse relative d’une paire de roues, si les patins de frein sont trop près de la jante par exemple. Ici avec les Fulcrum, ça passe sans problème. Restent les bosses, où l’efficacité du F10 fait merveille. Mais attention au retour de bâton, car la bête paraît tout de même un peu plus inflexible que le F8, et donc moins tolérante avec les coups de moins bien. Plus encore que n’importe quel autre Pinarello, le Dogma F10 nécessite que l’on joue fréquemment avec le sélecteur de vitesses, pour en tirer la quintessence et rester dans la bonne plage de cadence de pédalage. Avec le nouveau groupe Dura-Ace Di2, c’est bien entendu une formalité. Au terme de ce galop d’essai de 70 km et 1200 m de dénivelé, le Dogma F10 apparait comme un poil plus performant que le F8, qui est déjà un vélo fabuleux. Et on ne parle pas spécialement du gain aérodynamique, qu’il nous est impossible de vérifier en dehors de nos terrains de jeux habituels. Il est un peu plus ferme sous la pédale et un peu plus exigeant aussi, alors que le F8 est un cadre suffisamment polyvalent pour convenir à des cyclosportifs à la condition physique un peu moins aiguisée. Voilà d’ailleurs un argument qui devrait permettre de choisir au mieux entre les deux cadres, puisqu’ils restent très proches l’un de l’autre néanmoins.

Dans les détails

En dehors des proportions et du profil des tubes qui restent comparables au F8, Pinarello est toujours fidèle à certaines solutions techniques éprouvées pour leur justesse et leur fiabilité sur le Dogma F10 : étriers de freins classiques (pas de Direct Mount), boîte de pédalier filetée (en pas italien) et direction en 1 pouce 1/8 en haut et 1 pouce 1/2 en bas.

C’est en s’approchant que l’on distingue la nouveauté marquante, avec un tube diagonal désormais concave et avec un léger renflement latéral à hauteur du porte-bidon. Il a pour but de favoriser l’écoulement de l’air autour des bidons et a déjà été testé avec succès sur le Bolide TT. Le boîtier de jonction Di2, qui sert à intervenir sur les modes de fonctionnement des dérailleurs électriques Shimano, à recharger la batterie ou à régler les dérailleurs en roulant, est intégré dans le tube et accessible au dessus du porte-bidon plutôt que d’être fixé sous la potence ou le cintre.

Ce cumul de détails permettrait donc selon Pinarello de diminuer de 12,5% la résistance aéro au niveau de la partie basse du cadre. L’autre nouveauté concerne un petit appendice moulé avec les pattes de fourche nommé Fork Flap, et destiné à optimiser l’écoulement de l’air autour du levier de serrage à blocage rapide de la roue. L’impact aérodynamique de la fourche serait ainsi diminué de 10 %.

D’ailleurs, pour une question de logique, un F10 à freins à disque n’est pas du tout au programme. Pour cela, un F8 à disque et avec des axes traversants a été présenté il y a peu (voir : Pinarello 2016, du nouveau !). L’asymétrie du cadre est également légèrement augmentée par rapport au F8 et autres cadres Pinarello. Cela consiste en une boîte de pédalier légèrement décalée vers la droite et des parties de tubes plus rigides à droite qu’à gauche, pour équilibrer le comportement du vélo en tenant compte du positionnement de la transmission.


A gauche le F8, à droite le F10.

Si les montages complets du F10 sont réalisés avec une potence et un cintre aérodynamiques ou avec le nouveau combo Most Talon, les gaines de freins et les câbles Di2 passent toujours devant la colonne de direction, contrairement à certains modèles de la concurrence. Pas question de trop s’arracher les cheveux au moment du montage, donc, car le Dogma F10 doit rester un vélo de course polyvalent, apte à s’exprimer sur tous les terrains, où l’on pourra intervenir relativement rapidement sur le système de freinage, disposer d’une direction toujours fluide, et n’avoir aucun problème lors du transport du vélo. Pour conclure, le Pinarello Dogma F10 n’est pas révolutionnaire, mais il améliore encore subtilement le haut de gamme de la marque en termes de performances. Un peu plus pointu et exigeant que le F8, il devrait néanmoins rencontrer un franc succès, d’autant plus que les couleurs proposées au catalogue sont encore une fois assez excitantes.

PINARELLO DOGMA F10

Les + : aérodynamisme, rigidité, poids, tenue de route, look
Les – : prix, un peu plus exigeant que le F8

Cadre et fourche : Dogma F10, fibres de carbone Torayca T1100, finition 1K
Montages : Shimano Dura-Ace Di2 R9170 ou Sram Red eTap
13 tailles : 42 à 62 cm

Prix public :  environ 4700 € pour le kit cadre.

Voir aussi :
– Test du Pinarello Dogma F8
– Bike Chek Pinarello Dogma F8
– Pinarello 2016, du nouveau !

 

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7 commentaires sur “Exclusif : premier essai du nouveau Pinarello Dogma F10”

    1. Un brevet sur la forme d’un tube de vélo semble difficile à défendre, d’autant plus que le modèle proposé en premier par Velocity n’englobe que le bidon, alors que sur le Bolide TT ou le F10, la forme concave descend jusqu’à la boîte de pédalier. Reste le nom « concave » qui peut éventuellement poser problème. Mais là encore, Pinarello l’utilise comme adjectif et non pas comme nom de tube. Si le dépositaire du brevet devait l’emporter face à la justice, qu’en serait-il des tubes en forme de goutte d’eau, de l’architecture sloping, ou même de la forme de la roue? Bref, attendons d’en savoir plus sur l’évolution de cette affaire.

  1. Merci pour le complément d’info.

    Je suis par ailleurs curieux de savoir s’il est possible de mettre la main sur les études (en tout cas les leurs !!) justifiant que le bord de fuite concave apporte un gain de pénétration dans l’air. C’est totalement contraire aux principes de bases de la mécanique des fluides et des écoulements aérodynamiques. Je ne dis pas qu’ils sont dans le faux, mais j’aimerais pouvoir lire la démonstration physique de leurs dires.

    En revanche, les winglets de la fourche me paraissent eux beaucoup plus logiques, en tout cas conforme à ce qu’on sait des lois de l’aéronautique (tout comme le décochement du cadre juste derrière la tige de selle.

    Et bravo pour le site, toujours aussi sympa !

    François.

    1. François,
      d’accord avec la remarque sur le bord de fuite concave, cependant il faut regarder l’ensemble cadre + bidon. Je me souviens d’études mentionnées il y a quelques années disant qu’un ou deux bidons amélioraient l’aérodynamisme de l’ensemble. Ici j’ai l’impression que le fait que le bidon « rentre » dans le cadre diminue les turbulences à son niveau. Ceci étant dit je serais également content de voir une modélisation en éléments finis, et de voir l’écart entre le cadre avec et le cadre sans bidon.
      Merci pour le site et pour les commentaires, il ne reste plus qu’à casser la tirelire.

      1. entre les besoins aéro d’un cadre de vélo et d’une aile d’avion ou d’une pale d’hélico les buts recherchés ne sont pas les mêmes donc la trainée et le vortex doivent sans doute eux aussi etre diffèrents . ceci dit la forme de ce vélo est avant tout « cosmétique  » car a moins d’être taillé comme Froomey ou Bardet le gain est anesthésié par le cycliste lambda type ceci dit je suis « pina » depuis le prince alu et après avoir fait des incursions sur d’autre choses je ne change plus depuis mon Dogma magnésium en descente et sur revêtement mauvais aucune grande marque ne peut rivaliser . le »pire » des avions de chasse que j’ai eu c’est un Paris alu il passe les » flip flap » comme qui rigole et il engage sur l’angle comme une moto de grand prix démoniaque. donc Pinarello for ever

  2. Bonjour,

    J’ai fait l’acquisition de ce très beau vélo en mars de cette année. Faute de pouvoir trouver un PRINCE FX depuis la fin du coronavirus où on ne trouve plus rien d’ailleurs, un vélociste contacté à 400 km de chez moi et parce que j’ai eu de la chance je crois, me propose un cadre à ma taille qui était en démo dans son magasin.
    J’ai donc demandé un montage à la carte :
    Groupe Ultegra méca, roues BORA WTO 33, cintre Most carbone, pneus tubeless., pédales Ultegra, selle carbone.
    Ce que je ne savais pas avant d’aller le voir et même sur les photos préalablement transmises, c’est qu’apparemment c’est une série spéciale du F10 dispo en trois combinaisons de couleurs possibles, et qui n’était pas proposée à la rédaction de l’article supra :

    -Rouge/Noir Mat A610 (le mien)
    -Bleu/Noir Mat A612
    -Bleu/Blanc A616

    Après quelques milliers de km à son guidon, je confirme ce qui est écrit dans le texte de l’essai, surtout quant à la précision/maniabilité diaboliques de La fourche, ainsi que la nécessité de toujours cadencer un minimum sous peine de caler dans l’ascension ou le sommet d’une bosse…… Ça rend ce vélo quand-même exigeant. On sent vraiment la grande rigidité latérale du vélo, surtout en danseuse. Il faut pouvoir l’emmener, l’engin.
    Les relances sont exceptionnelles, je l’appelle « mon TGV », c’est une machine qui voudrait un « pilote » toujours plus puissant pour rouler toujours plus vite. Le freinage à patins sur jantes carbone n’a rien à envier à un système à disques sur le sec. Coté confort: je n’ai pas à me plaindre, c’est même étonnant. Il est bien plus confortable que mon Canyon endurance alu, c’est dire. je ne regrette pas une seconde son achat.
    En toute transparence, il m’a couté 8500€ dans la configuration citée, remises incluses.
    Je regrette juste une chose, c’est de n’en avoir jamais vu aucun autre !

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