Absa Cape Epic 2016, de la formation de l’équipe à la victoire finale, l’envers du décor

cape-epic-jeff-bossler-fanny-bourdon-mixte

ABSA CAPE EPIC 2016, retour sur la préparation de l’équipage vainqueur en catégorie Mixte

Voilà déjà plus d’une semaine que nous montions sur la plus haute marche du podium en équipage mixte lors de la 13ème édition de la mythique Cape Epic. Vous avez pu suivre notre résumé journalier sur VeloChannel.com, ce n’était qu’un aperçu des étapes en oubliant un peu certains aspects par manque de temps, les journées filent vite lors de la course. Voici à froid notre témoignage en deux parties : de la formation de notre équipe au départ du prologue, puis notre semaine de course et le retour à la réalité.

Texte : Jeff Bossler – Photos : Absa Cape Epic et Jeff Bossler 

Retour en arrière fin mars 2015, après une semaine de course pleine et une première expérience en course mixte, nous finissions avec Coralie Redelsperger sur la 3ème marche du podium. C’était notre objectif et nous étions pleinement satisfait, je pensais sincèrement que l’aventure Absa Cape Epic s’arrêterait là après 6 participations en ce qui me concerne…

Cape Epic Jeff Coco Podium 1

Et nous avons discuté avec Fanny Bourdon, pris rendez vous pour boire un verre la veille du Roc Marathon. Je connaissais déjà Fanny mais, sachant qu’au niveau des caractères cela fonctionnerait, qu’en était-il de nos motivations respectives ? De mon côté je connais les sacrifices à faire durant l’hiver pour arriver prêt, mais après 6 éditions je ne pouvais plus être le moteur unique. Cela va faire cliché, mais notre victoire s’est probablement déjà construite autour de ce verre partagé sur le port de Fréjus un soir d’octobre 2015. En effet, Fanny est arrivée avec un enthousiasme débordant, m’expliquant que la Cape Epic était son rêve de coureuse, qu’elle venait de finir ses études de médecine et ne disposait que d’une année avant de travailler 4 ans non stop en hôpital. La Cape Epic au top niveau pour elle, c’était 2016 ou jamais. De plus, souhaitant vivre une expérience à l’étranger et parfaire sa connaissance de la langue anglaise, elle proposait de partir dès la mi-janvier à Cape Town pour s’entrainer avec de meilleures conditions qu’en Europe. En ce qui me concerne, recourir en mixte impliquait d’essayer de faire au moins aussi bien qu’en 2015, et si possible porter au moins une fois le maillot de leader. Cela ne posait pas de problème à Fanny non plus de faire son maximum et non uniquement l’objectif de finir.

Voilà un des points importants lors du choix de votre équipier, il peut être votre meilleur ami, mais il faut impérativement s’accorder sur l’objectif de la Cape Epic, « finir » est évidemment le minimum mais être bien sûr qu’aucun des deux ne soit frustré de ne pas tenter un classement correct.

Pour l’anecdote, le lendemain au cours du Roc Marathon, je casserais ma tige de selle à Roquebrune, j’en profiterais pour essayer de réparer et attendre Fanny pour finir le parcours avec elle. Ce qui me permettra de me rendre compte que dans les descentes, va falloir ouvrir en grand pour la suivre !

Si l’équipe est constituée, l’inscription validée et les billets d’avion réservés, notre premier obstacle va arriver rapidement. L’ Absa Cape Epic, c’est 700 km de terrains difficiles, cassants mais aussi roulants par moment. La monture idéale pour cette épreuve est un tout suspendu en roues de 29 pouces, léger et en double plateaux. J’avais eu la chance d’en tester un excellent qui m’avait conquis fin de l’été 2015, voir Essai Bulls Wild Edge Team 29. La marque étant de plus en plus active en France et souhaitant se développer, elle acceptait de nous prêter 2 vélos complets pour l’épreuve. J’en profite pour remercier Bulls et Thomas Dietsch qui s’est démené pour que nous puissions rouler sur 2 Wild Edge Team équivalents à ceux qui équiperont le team Bulls victorieux de Platt et Huber. Et si dans un premier temps le Team Look Beaumes de Venise – l’équipe à laquelle appartient Fanny – accepte vu que les orientations du Team ne portent pas sur ce type d’épreuve, ce sera l’équipementier principal qui reviendra sur sa décision pour lui interdire de rouler sur une autre marque. Mais de leur côté, il n’y a pas de 29 pouces tout-suspendu léger au catalogue, seul le hardtail de XCO est en 29 pouces et uniquement en Taille M ou L…  Nous sommes mi-décembre, tout est à refaire. Je dois avouer aujourd’hui que j’ai été à 2 doigts de jeter l’éponge, c’était vraiment la mort dans l’âme que j’ai annulé cette offre de partenariat Bulls et mis plus d’une semaine pour rebondir.

« Aide toi et le ciel t’aidera » ou plutôt tant qu’à faire « aide tes amis et ceux ci t’aiderons ! » Les 2 dernières éditions, j’avais roulé sur un semi-rigide Open 1.0 qui était toujours dans mon garage – voir OPEN 1.0 spécial Cape Epic. Alors tant qu’à devoir refaire la Cape Epic sur un hardtail, autant rouler sur le meilleur connu et surtout promouvoir cette petite marque dont le fondateur Andy est devenu un ami. Remontage de mon cadre en double 36/25 et transmission Shimano Di2 11V. Un capteur de puissance Rotor InPower me servira à gérer nos efforts et ne pas faire sauter Fanny sur le plat ou en bosse. Du côté des roues, il fallait compenser la rigidité de nos hardtails, les Kappius se sont imposés. Largeur interne de 26 mm, montage de pneus en 2.2 ou 2.25, une légère souplesse verticale en feront nos alliés pour cette édition 2016 – voir Essai Kappius KX-1.5. Même régime pour le vélo de Fanny, double plateau en pédalier Rotor Rex et roues Kappius avec pneus larges – Voir : BikeCheck LOOK 989 de Fanny Bourdon montage Cape Epic – et on optimise les points d’appuis que sont la selle et les poignées, complétés par l’usage de gants épais et cuissards Assos.

lyti-carbon frein-hope-fourche-sr-suntour-axon-carbon shimano-rex-inpower-etrier-hope rotor-rex-inpower-shimano-xtr-di2 open-cape-epic-shimano-di2-XTR Open-cape-epic-sr-suntour-kappius

Ce point matériel réglé, nous savons que nous devrons être performants dans les montées et sur les portions de plat, et être très vigilants dans les descentes et les parties défoncées. La gestion de nos montures sera un point primordial, nous n’aurons pas le droit à l’erreur.

Côté entrainement, le véritable hiver froid et humide ne débutera que mi-janvier, pile poil pour le départ de Fanny qui retrouvera des conditions presque trop chaudes en Afrique du Sud. En France, ce fut beaucoup plus compliqué et il a fallu alterner course à pied, VTT, Gravel et sorties courtes en vélo de route. Il a été très compliqué d’accumuler des sorties longues et la plupart je les ai réalisé en VTT, seul moyen de rester chaud pendant 5H. Je dois aussi remercier le Team VTT Annecy CC qui a accepté que je me joigne à eux lors de leur stage à Fréjus mi-février. C’est durant cette semaine en multipliant les sorties souvent en biquotidien, que j’ai vraiment senti que la forme revenait. Ce fut fatiguant mais très bénéfique. Entre le stage et le départ il restait presque 4 semaines, il fallait d’abord bien récupérer et simplement travailler le rythme. Travail de la PMA, des départs, du seuil et des sprints courts, à chaque fois des sorties de 2H30 maxi. J’avais aussi prévu de participer à 2 courses avant le départ, une sur route et une VTT. Malheureusement le temps a été exécrable les 2 week ends précédents, les enjeux étaient trop importants pour prendre des risques et tomber bêtement, une bonne séance de Gimenez sur Home Trainer les a remplacé. C’était la première fois que je ne courrais pas avant une Cape Epic, tant pis ça ira quand même !

matos-cape-epic matos-cape-epic-kappius

Nous sommes le 7 mars 2016, une semaine avant le départ du prologue, il est temps de réunir toutes les affaires nécessaires et de les lister pour être bien certain de ne rien oublier, de tester une dernière fois le vélo et s’assurer que nous avons bien tout en main. Il y aura beaucoup d’échanges de messages avec Fanny qui est en Afrique du Sud pour lui ramener de la diététique, du matériel et quelques affaires manquantes de son côté. Et évidemment il aura fallu régler un problème de dernière minute. Les chaussures commandées en décembre n’arriveront que début mars, et avec la mauvaise idée d’être trop petites malgré les essais des modèles 2015 au préalable. Impossible d’avoir la pointure supérieure à temps, je me dis tant pis je ferais avec celles des saisons 2014 et 2015. Heureusement que le dernier essai du vélo m’a laissé une sensation bizarre avec la chaussure droite, probablement la cale usée… Manqué ! C’est la semelle carbone qui est fendue, bien joué à 48 heures du départ il faudra trouver une chaussure de remplacement, mais il vaut mieux le voir avant que pendant !

Cape-Epic-Velochannel

Mercredi 9 mars, réveil avant 4H du matin, rarement ce ne fut si facile de se lever et de partir pour l’aéroport. La météo s’annonçait pourrie en France, j’allais retrouver mes amis Terry et Leila au Cap, sans compter mon équipière qui commençait à stresser et dont ma présence devenait nécessaire. Les 2 bagages de 23 kg chacun arriveront avec moi sans encombres et dès le mercredi soir je dormirais à Cape Town dans un bon lit afin de récupérer du voyage du jour de 15 heures.

Le jeudi, je suis le dernier à me lever, Leila a déjà été roulé, Fanny est levée aussi depuis longtemps, le rythme sud africain est bien différent de l’européen. La sortie de vélo se fait de bon matin pour ne pas trop souffrir de la chaleur. Au contraire pour moi, il est important d’y aller aux heures les plus chaudes afin de m’habituer le plus rapidement possible, je n’ai que 3 jours pour que mon corps se réadapte aux 40°C. Si au début je comptais ne faire que 2H de route, la gourmandise l’emportera. C’est juste tellement bon de rouler en court et de profiter des paysages de la Chapman’s Peak Road, une route de littoral surplombant l’océan. Quasiment 3H plus tard nous serons de retour à l’appartement mais avec la banane. Fanny avait coupé tout le début de semaine afin de refaire du jus, la sortie un peu rythmée nous a donné confiance. Nous passons notre soirée du jeudi soir à discuter et j’essaie de beaucoup la rassurer. à J-3 Fanny stresse de ne pas être à la hauteur, ne pas arriver à finir. Il faut trouver les bons mots, dédramatiser la situation : ce n’est qu’une course de vélo, nous ne jouons pas notre vie. D’abord se faire plaisir, donner le meilleur de soi même et prendre étape après étape. Hors de question de parler de résultat, tactique même si je rêvais de ce maillot de leader.

Le vendredi matin, nous irons faire du VTT sur le parcours du prologue de l’édition 2015, Tafelberg road / single sur Cape Town University et remontée vers Deadman’s Tree. 1H30 pour reprendre contact avec le terrain africain, sec et poussiéreux, fuyant et piégeur surtout quand on arrive du froid et de la boue. C’est un coup de guidon à reprendre, vous avez toujours l’impression que votre vélo ne tournera jamais dans la courbe, que la roue avant va glisser, mais en fait non, il faut aller chercher les appuis au delà de la poussière superficielle et ça passe. Ensuite notre ange gardien Leila nous emmènera à notre hôtel proche du Waterfront pour les 2 dernières nuits, et ceci afin d’être au coeur de la procédure de retrait du package / dépôt des vélos et bagages. Le vendredi soir, c’est repas « Around the World Party », de nombreux coureurs des pays des quatre coins du monde se retrouvent pour un diner commun d’avant course. Nous ferons une table media avec des espagnols, suisses, sud-africains et américains. La langue commune sera bien sûr l’anglais. Chacun essait de représenter son pays en venant plus ou moins déguisé. Avec Fanny nous irons portant le maillot France VTT mais avec une baguette sous le bras (pas pensé au béret en partant et je n’en avais de toute façon pas à disposition chez moi). Mention spéciale au Suédois déguisé en skieur alpin avec combinaison et bonnet, vu la température il était déjà bien sec à la fin de la soirée !

Le samedi, après le petit déjeuner, les choses sérieuses commencent. Direction le Lockout, un lieu proche du front de mer où sont centralisées toutes les procédures de retrait des 2 dossards / 2 puces de chronométrage / 1 tracker GPS par équipe. Puis chacun son sac Evoc de 80L, ce sera notre seul ami de la semaine pour mettre l’ensemble des affaires. Ne pas oublier nos 5 bidons chacun car nous avons réservé le pack nutrition permettant chaque jour de récupérer des bidons avec notre boisson au deuxième ravitaillement, ainsi qu’un bidon à l’arrivée avec la boisson de récupération. Retour à l’hôtel et départ pour un dernier entrainement VTT sur route, il s’agira de faire maxi 1H de déblocage avec 3 ou 4 sprints courts pour faire monter le coeur. Puis le reste de l’après midi sera consacré à l’organisation de notre sac Evoc, de la préparation du vélo pour le lendemain avec un sac d’affaires pour la journée, et du rangement de tous les superflus dans la housse vélo. Vers 17H, il est temps de charger le vélo dans le camion qui nous l’amènera au prologue à Meerendaal, et de mettre la housse dans le container qui sera stocké une semaine. Voilà, les dés sont jetés, nous prendrons notre dernier repas à l’hôtel tôt, en compagnie de Terry un membre de l’organisation qui nous permettra de nous changer les idées. Couchés tôt aussi, car demain la dernière navette partira à 7H30 il faudra déjà se lever à 6H00. Fanny réussira à s’endormir assez facilement, pour ma part c’est plus compliqué et je tournerais dans le lit un certain temps avant de trouver le sommeil. Dans ma tête beaucoup de pensées se succèdent et je sais que c’est l’année ou jamais. Ma partenaire Fanny a été 2 fois championne de France de XC Marathon et a un gros niveau, je me sens prêt à relever le défi physique et il n’y a pas d’équipe d’extraterrestres dans la catégorie mixte cette année comme il y a pu en avoir en 2011 avec Esther Süss ou en 2012 et 2013 avec Arianne Kleinhanns. Je l’ai caché à Fanny mais la pression est bien là.

Cape-Epic-parc-vélos

Dimanche réveil à 6H00, petit déjeuner à l’hôtel et je ne pourrais pas manger autant que la veille. Pourtant notre départ n’est qu’à 11H00, mais l’estomac est noué. Nous montons dans la dernière navette pour le prologue à Meerendaal pour une arrivée à 8H30 sur place. Depuis 6H45 les équipes se succèdent au départ, faire partir 630 équipages sur un format CLM représente un peu de temps quand même ! Récupération de nos vélos dans le parc puis nous nous préparons. Même si le prologue est court avec 26 km, nous nous sommes préparés pour des marathons à répétition ce qui signifie que pour être efficace en cross court, il nous faut un long échauffement que nous débuterons vers 10H00. Si au début lors du premier quart d’heure de roulage nous parlons et plaisantons, au fur et à mesure que nous multiplions les accélérations pour faire monter le coeur, cela rigole beaucoup moins. Nous nous présentons à l’appel 10 minutes avant notre départ. Les autres équipes mixtes sont présentes, nous découvrons nos adversaires pour la semaine. Nous partons avant derniers, devant nous à 50 secondes les Israéliens qui avaient finis seconds en 2014, et juste derrière la vainqueur sortante Yvonne Craft associée à Jean-Luc Perez. Compte à rebours, 10 secondes …. 3 – 2 – 1 …

A suivre…


Voir aussi :

cape-epic-leader-mixte-fanny-bourdon-jeff-bossler


> Autres infos VTT :www.velochannel.com/VTT
> Autres infos Evénements : www.velochannel.com/Evénement
> Suivez VeloChannel.com sur Facebook et Twitter

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.