Test du Adrisport RD Aero

LE FAUX DUR

Spécialiste de la VPC, Adrisport est aussi une marque de vélos. Au sein de la courte gamme, des modèles au rapport qualité-prix étonnant, montés et réglés dans les règles de l’art, et garantis 3 ans. Comme ce RD Aero, qui vise l’ultra performance pour 3790 €.

La jeune marque française propose dans sa gamme deux cadres de route, deux cadres de VTT (typés XC), deux cadres de cyclocross et un cadre de contre-la-montre. Les prix des vélos de route complets s’étendent de 1590 à 5390 €, avec toutefois la possibilité d’un montage personnalisé à partir de chacun des cadres disponibles. C’est d’ailleurs la force d’une structure comme Adrisport (basée en Bretagne à Moustoir-Ac) par rapport aux mastodontes dans le domaine comme Canyon ou Rose par exemple : une relative souplesse au niveau du choix ou de la taille des composants, pour les manivelles ou les pneus ou les boyaux. D’emblée cependant, on remarque que c’est avant tout un public de coureurs amateurs qui est visé, avec une géométrie des cadres typée compétition, et des braquets réellement adaptés à l’usage que l’on en fait (surtout en Bretagne !) : un double plateau de 52/36 et une cassette 11 vitesses de 12/25.

Bien installée depuis quelques années déjà, Adrisport ne fait pas mystère de la provenance de ces cadres. Ils proviennent d’Asie, et en cherchant bien on doit pouvoir retrouver les mêmes sous d’autres marques. Ce sont ce qu’on appelle plus communément des cadres « génériques ». Adrisport ne dispose sans doute pas de la puissance financière pour concevoir les cadres directement, et se fournit donc chez un fabricant à l’autre bout du monde. Si les prix demeurent raisonnables par rapport aux produits des grandes marques (les prix vont de 1190 à 1490 € pour le kit ou module cadre), nous avons peu d’informations concernant le type de carbone utilisé. Nous savons qu’il s’agit de fibres de carbone Toray, et que les cadres sont disponibles en cinq tailles. Le fabricant sort ce genre de modèle en grande série, sans conception vraiment nouvelle et à partir de moules déjà largement amortis. Et surtout sans marketing agressif. Cela explique le prix de revient relativement faible par rapport aux cadres des marques les plus célèbres. Passer par une marque comme Adrisport plutôt qu’acheter directement chez un fabricant générique assure tout de même un suivi et une garantie. Ici, elle est de trois ans sur le cadre et les roues, ce qui est supérieur à la garantie de deux ans de la plupart des marques dites « réputées » ! En attendant, visuellement, lors de l’installation des roues et au roulage, le RD Aero semble très propre et sans souci.

Module aérodynamique

Comme son nom l’indique, le RD Aero est conçu pour fendre le vent, avec un tube diagonal large et aplati, un tube horizontal qui s’affine au fur et à mesure que l’on s’approche de la tige de selle et un tube de selle qui fait une sorte de carénage autour de la roue arrière, sous les haubans. C’est la fourche qui est la plus spectaculaire, avec ses fourreaux droits et larges, puisqu’elle englobe une partie avant fuselée qui passe devant la douille de direction, jusqu’à la bague du jeu de direction ovale. Dommage d’ailleurs que celle-ci soit si haute, car elle limite le réglage du poste de pilotage. Attention, car à cause de l’architecture même de la partie avant, il est impossible de tourner complètement le guidon, ce qui peut poser problème pour transporter le vélo en voiture ou dans une housse.

La tige de selle est également aplatie, et propose trois positions pour le chariot. On note que le serrage s’effectue par l’intermédiaire d’un tampon tangent, discret et efficace. Les courts haubans sont profilés, alors que les bases sont plutôt épaisses. Tous les câbles passent à l’intérieur des tubes, et le cadre est compatible Di2 ou mécanique. La boîte de pédalier est en BB86 PressFit, et la direction est en 1-1/8’’ en haut et en bas.

Il est disponible dans cette livrée noire mate, ou en rouge et noir. Le RD Aero est fourni avec des étriers Shimano Direct-Mount, qui offrent un freinage puissant mais curieusement un peu plus doux qu’avec les mêmes étriers en montage classique comme nous nous avions déjà pu le remarquer sur d’autres vélos. Le module RD Aero est aussi fourni avec un combo cintre et potence Aerobar spécifique, à la forme un peu particulière. En effet, en plus d’être assez haut et avec un profil aérodynamique, le bas du cintre est plus large que la partie dévolue au serrage des poignées de frein. Il se montre néanmoins assez confortable à l’usage, que ce soit dans sa large partie haute, que mains aux cocottes ou mains en bas. Cinq tailles sont proposées, avec un sloping peu prononcé, et un tube supérieur assez court. Aucun problème de finition remarqué comme cela peut parfois être souligné sur des cadres qui ne sortent pas des grandes marques : le réglage de la direction ne pose aucun problème (on peut serrer et ça reste fluide), et lors du montage des roues, celles-ci s’alignent parfaitement entre la tête de fourche et les bases et haubans.

Un montage à la hauteur

Le RD Aero est proposé avec des montages en Shimano 105, Ultegra, Ultegra Di2, Dura-Ace et Dura-Ace Di2, et avec des roues Vision Trimax T30 ou Adrisport Pro 3.3 ou 5.5, à pneu ou à boyau. Cette version en Ultegra Di2 et roues 5.5 à boyau est assez exclusive. Le groupe n’appelle aucun commentaire, puisqu’il est du même niveau de fonctionnement qu’un Dura-Ace, avec juste un peu de poids en plus. Les roues Pro 5.5 ont des jantes de 55 mm de haut et de 25 mm de large, sont équipées de moyeux DT Swiss 350 SP, de rayons Pillar PSR (20 à l’avant, 24 à l’arrière) et de blocages titanes. Elles sont annoncées à 1390 g la paire. Au niveau des périphériques, Adrisport ne fait pas de petites économies, avec une selle Prologo Nago Evo CPC, un ruban de cintre Prologo Gel, des boyaux Continental Competition en 25 mm. Pesé à peine au dessus de 7 kg en taille M, ce vélo destiné à rouler vite et fort s’affiche donc au prix de 3790 €. Sur le papier, difficile de faire mieux avec un cadre aérodynamique, des roues à jantes hautes et un groupe Shimano Di2.

Presque accessible

Malgré ce montage exclusif – mais super soigné – le RD Aero est plus accessible physiquement qu’il y paraît. Bien sûr, il faut composer avec la hauteur des jantes : avec 55 mm de hauteur, cela devient pointu à piloter, surtout pour un gabarit léger lorsqu’il y a du vent. Les trajectoires réclament beaucoup d’attention, et on a tendance à se faire un peu balader de gauche à droite avec le vent de côté. Le freinage n’a pas l’excellence de certaines roues de grandes marques comme Mavic ou Campagnolo par exemple. Si on effleure la surface de freinage pour rechercher un simple ralentissement, on ressent des à-coups désagréables. Il faut donc freiner fort pour maîtriser le vélo. Cette caractéristique pourrait poser des problèmes de surchauffe notamment lors des longues descentes de col, bien qu’a priori, ce vélo ne soit pas fait pour cela. Par ailleurs, les jantes sont assez sensibles au manque d’équilibrage dû au trou de la valve. Elles tournent rond, sans saut et sans voile, mais il faut se faire à un petit balancement ressenti en roulant. Cependant, leur rigidité n’est absolument pas prise en défaut, et un gabarit normal peut rapprocher nettement les patins des jantes sans risquer de les voir frotter. Cette rigidité leur confère de la tonicité et permet au vélo de ne pas être pénalisé en grimpant. Un très bon point, d’autant plus qu’elles filtrent très correctement les vibrations. Le cadre en lui-même est assez versatile. Agréable en roulant tranquillement – on ne se sent pas secoué comme un prunier – il roule bien en ligne et avec suffisamment de rigidité pour ne pas se désunir lors des montées en force, en restant assis.

Ni les plateaux au milieu de la fourchette de dérailleur, ni les roues ne bougent. En danseuse et à la relance, il se montre assez doux pour que les jambes ne buttent pas sur un trop grand braquet. On sent le cadre se déformer légèrement latéralement, ce qui permet de dépasser le verrouillage de la boîte. Il est ainsi possible de se tromper de développement ou d’enrouler sur le couple sans trop de conséquence. Sur les très hautes sollicitations en revanche, la partie avant montre un peu trop d’élasticité. Le cintre monocoque fléchit un peu, ce qui donne du dynamisme lors des relances habituelles, mais peut se révéler handicapant en cas de gros sprint par exemple. C’est finalement au train que le RD Aero est le meilleur. Il permet de rouler vite et longtemps grâce à son aérodynamisme, la qualité de ses roulements et son inertie positive. Son comportement permet de conserver le braquet choisi dans un faux plat ou sur un « coup de cul ». Il s’accommode parfaitement des grosses moyennes, des parcours en ligne et même des bosses à fort pourcentage, dès lors qu’on ne relance pas comme un sauvage à la sortie de chaque virage – situation où il se désunit un peu. Bref, c’est un vélo qui ne trahit pas ses visées de lutte contre le vent et le temps, mais qui n’est pas aussi rigide et compact qu’un vélo destiné à faire des critériums. Reste que au sein de la gamme Adrisport, le RL 09 est fait pour ça. On apprécie surtout la qualité du montage, et le rapport qualité-prix des composants. Sans être aussi exceptionnel qu’un vélo de grande marque (peut-être plus rigide et plus polyvalent encore mais souvent vendu deux fois plus cher), le RD Aero joue dans le même registre. S’il peut s’avérer pointu à piloter dans certaines conditions, il ne casse pas les jambes tout en assurant un rendement de très bon niveau. Les propositions d’Adrisport sont donc résolument à retenir.

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